José Sarica, naturaliste : « Après ma première expédition en Antarctique, je savais que je devais y retourner. »

Le 15 janvier, José Sarica, directeur de l'expérience expédition chez Ponant, était à Agen pour partager son expertise avec l’agence Agena Voyages. Passionné par l’aventure et la nature, il nous raconte son parcours fascinant et les défis qu’il relève pour offrir des voyages uniques alliant exploration et respect des écosystèmes.

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Le 15 janvier dernier, José Sarica, directeur de l’expérience expéditions chez Ponant, était présent à Agen pour une conférence organisée par l’agence Agena Voyages. L’occasion pour lui de partager son expertise et de dévoiler les coulisses de la création de voyages d’exploration uniques. Passionné par l’aventure, la nature et l’immersion dans des territoires sauvages, il nous raconte son parcours fascinant et les défis qu’il relève pour offrir aux voyageurs des expériences exceptionnelles.

Quidam Hebdo : Pourriez-vous vous présenter brièvement ?
José Sarica : Bien sûr ! Je m’appelle José Sarica, j’ai 47 ans, et je travaille chez Ponant en tant que directeur de l’expérience expéditions. Un titre qui peut paraître un peu abstrait, mais qui définit un métier passionnant. J’ai toujours été passionné par l’aventure, la nature, et l’exploration. Dès mon enfance, cette passion m’a guidé tout au long de ma vie et me permet aujourd’hui de concevoir des voyages uniques pour les passionnés de découvertes.

Q.H. : Qu’est-ce qui vous amène à Agen aujourd’hui, et dans quel cadre cette rencontre se déroule-t-elle ?
J.S : Je suis ici à Agen grâce à l’agence Agena Voyages, dirigée par Carole Lacapère. C’est un cadre un peu particulier : une soirée dédiée à la présentation de nos nouveaux voyages d’exploration. Ponant, une compagnie de croisières française, propose des voyages qui sortent des sentiers battus. L’idée est de partager avec nos partenaires comment nous créons ces voyages et pourquoi ils sont uniques. Je suis là pour leur expliquer comment nous imaginons et concevons ces expéditions, en collaboration avec les communautés locales et des experts. Ce que j’aime particulièrement, c’est cette approche de co-construction avec les peuples rencontrés sur place.

Q.H. : On pourrait presque dire que votre rôle s’apparente à celui d’un explorateur, non ?
J.S : Oui, exactement. Dès mon enfance, le mot exploration résonnait fort en moi. Mon père, italien, m’a transmis cette idée de nomadisme. Il est venu en France adolescent, ce qui a, je pense, nourri ma curiosité pour le monde. À 6 ans, j’ai vu un film sur les orques, Orca, et ce fut une révélation. J’ai décidé que je voulais travailler avec eux, et cette passion m’a poussé à poursuivre des études en biologie marine, d’abord au Québec. À partir de là, ma vie a pris un tournant.
Après avoir travaillé en tant que professeur, j’ai découvert la zoothérapie, une voie qui m’a permis de combiner mon amour des animaux et mon désir d’aider les gens, en particulier les enfants autistes, grâce à un chien que j’avais formé. Puis, un jour, un ami d’enfance, Nicolas Dubreuil, m’a proposé de rejoindre une expédition en Antarctique comme naturaliste, pour remplacer un membre de l’équipage pendant 15 jours. Ce fut le début d’une nouvelle aventure professionnelle.
Au fil des années, mon rôle a évolué. Après plusieurs années en mer, j’ai ressenti le besoin de me poser un peu, alors je me suis réinstallé à Québec avant de revenir à Marseille pour gérer les expéditions. C’est à ce moment-là que j’ai rejoint Ponant, en 2017, pour prendre en charge la création de nouveaux voyages. Ce travail de conception est totalement en phase avec ce que j’ai toujours voulu faire : voyager pour offrir des expériences uniques.

Q.H. : Quel est précisément votre rôle au sein de Ponant ?
J.S : Aujourd’hui, avec l’équipe R&D de Ponant, nous sommes trois à travailler sur ces projets. Mon rôle principal est de créer de nouvelles destinations. Avant de les commercialiser, nous partons en repérage. Nous échangeons avec les populations locales, trouvons les meilleurs guides et réceptifs locaux qui nous aident à organiser ces expéditions. Nous voulons vraiment offrir des voyages à la fois inédits et respectueux des traditions locales.
Par exemple, avec les Inuits groenlandais de Kullorsuaq, il faut souvent trouver un guide qui parle à la fois le groenlandais et l’anglais, ce qui peut être un vrai défi. Mais ce travail de préparation en amont est essentiel pour garantir une expérience fluide et authentique pour nos passagers. Chaque année, nous faisons un point sur tous nos voyages existants, recueillons les retours des passagers et des équipages, et ajustons nos propositions pour les améliorer.

Q.H. : Cela semble être un travail en constante évolution. Quel est le principal défi que vous rencontrez dans ce processus ?
José Sarica : Exactement. Ce n’est pas seulement une question de création de nouveaux voyages, mais aussi d’optimisation de ceux qui existent déjà. Nous organisons des réunions avec les commandants et chefs d’expéditions pour analyser ce qui a fonctionné ou non. C’est à partir de ces retours que nous peaufinons nos voyages pour les rendre encore plus attrayants. Ce processus repose sur cette volonté de créer des moments exceptionnels pour nos voyageurs, tout en préservant les écosystèmes et en respectant les populations locales.

Q.H. : Parmi tous ces moments exceptionnels que vous créez, quels sont ceux qui, pour vous, restent les plus marquants ?
J. S : Si je fais un retour sur mon parcours, je me rends compte que tout ça découle de cette passion d’enfant, celle de voyager et d’explorer. Si je n’avais pas eu cette fascination pour les orques et les baleines, et cette volonté de les protéger, je n’aurais jamais entrepris ce parcours. En Antarctique, par exemple, j’ai vu des animaux marins qui ne sont pas chassés, qui viennent vers vous sans peur, juste par curiosité. C’est un moment magique, un cadeau de la nature. C’est une rencontre, un regard, que l’on n’oublie jamais.
Dans ces expéditions, il y a des moments où la nature nous dépasse totalement. Par exemple, en Antarctique, lorsque vous arrivez à Ushuaïa et que vous descendez dans les mers australes, vous vous retrouvez face à des paysages à couper le souffle, entouré de manchots royaux, d’otaries à fourrure et d’éléphants de mer. C’est un spectacle de vie sauvage incomparable. Ces animaux vous fascinent, vous les voyez se comporter avec une innocence et une curiosité absolues. C’est une expérience tellement intense que vous en ressortez bouleversé.
Et puis, il y a cet aspect presque spirituel. En Antarctique, tout est démesuré : l’immensité de la glace, les icebergs géants, la blancheur pure de l’environnement. Vous vous sentez tout petit, face à cette nature brute. C’est comme si vous étiez sur une autre planète, une planète où la beauté de la nature est en tout point impressionnante.
Après ma première expédition en Antarctique, je savais que je devais y retourner. C’était un choc émotionnel, un véritable coup de poing. Je suis tombé amoureux de cet endroit.
Ce voyage en Antarctique est et restera l’une des plus belles expériences de ma vie. Voir des baleines qui ne sont plus chassées et qui viennent nous montrer leurs baleineaux en toute sérénité… Ces moments-là vous marquent à vie. Et ce que j’aime particulièrement, c’est cette dimension éducative. On enseigne aux passagers la préservation de ces environnements, on leur montre à quel point chaque geste compte pour protéger cette biodiversité. Ce type de voyage ne se limite pas à l’aspect touristique, il y a une réelle mission derrière.

Q.H. : Croyez-vous que nous approchons de la fin de la découverte du monde ?
J.S: Non, je ne pense pas. En fait, même en France, il y a encore plein d’endroits que je ne connais pas et qui pourraient tout à fait être des lieux d’exploration. Par exemple, je vis à Marseille et je n’ai pas fait beaucoup de randonnées dans les Calanques, alors qu’il y a des parcours sublimes qui vous amènent dans des paysages incroyables. Donc, je pense qu’heureusement, il reste encore beaucoup d’endroits qui ne sont pas pleinement explorés.
Prenons la Papouasie-Nouvelle-Guinée. On y va dans certains endroits, mais je pense que 80 % de l’archipel reste intact et inexploré. La forêt y est si dense qu’il y a des zones où l’homme n’a jamais mis les pieds. Il y a des lieux que l’on devrait revisiter, à voir avec un regard neuf.

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