
Le maire d’Agen, Jean Dionis du Séjour, ne cache pas sa déception : « C’est un coup dur pour nous », concède-t-il à propos de l’abandon du projet de passerelle provisoire qui devait relier le quartier de l’Ermitage au centre-ville. Votée en avril dernier, la construction de cette passerelle temporaire a finalement été jugée irréalisable dans les délais impartis, après une série de complications techniques.
Point d’achoppement principal : les fameuses « opérations coup de poing » (OCP), ces rares créneaux pendant lesquels la circulation ferroviaire est suspendue, indispensables pour toute intervention au-dessus des voies de la SNCF. « Nous avions obtenu une OCP du 8 au 11 novembre 2025. Mais très vite, il est apparu que ce laps de temps ne suffirait pas à poser l’ouvrage en toute sécurité », résume le maire.

Les entreprises mandatées ont mis en évidence la nécessité d’ancrer la passerelle sur des micropieux profonds, et non des fondations superficielles, comme envisagé au départ. Résultat : des travaux repoussés à la prochaine OCP, et une mise en service qui aurait glissé vers fin 2026. Pour un usage limité à deux ans, le coût : estimé entre 1,5 et 2 millions d’euros, devenait, selon le maire, « difficilement justifiable ».
La promesse Gauja réparée pour fin 2027
Plutôt que de persister dans une impasse technique et budgétaire, la Ville a donc choisi de recentrer ses efforts sur la rénovation de la passerelle Gauja, construite en 1912 et fermée depuis début 2023 pour raisons de sécurité. Et là encore, tout dépend de la coordination avec la SNCF. « Grâce à un engagement fort de SNCF Réseau, nous allons bénéficier de créneaux OCP supplémentaires sur 2026 et 2027. Cela permet de viser une réouverture de la passerelle à la fin de l’année 2027 », annonce Jean Dionis. Une date avancée d’un an par rapport au calendrier initial. Le chantier s’annonce néanmoins complexe, tant pour ses contraintes techniques que pour son coût, évalué à 3,5 millions d’euros. Une enveloppe que la municipalité espère partager avec les autres collectivités et partenaires institutionnels.
L’aménagement prochains des quais
En attendant, les habitants de l’Ermitage devront composer avec l’absence de liaison piétonne directe vers le centre-ville. Une situation qui alimente leur frustration, particulièrement chez les lycéens et usagers quotidiens. Pour atténuer cet isolement, la mairie a mis en place une desserte en bus, jugée « précieuse mais coûteuse ». « Nous partageons le financement avec l’Agglomération. Pour la suite, on avisera en fonction des besoins », précise l’édile. Surtout, des aménagements pérennes sont prévus pour sécuriser les mobilités douces. Une voie verte sera aménagée d’ici fin 2026 le long du canal, du pont de Courpian jusqu’à la gare routière en passant par le pont Piketty, qui passera en sens unique pour les voitures. Les structures obsolètes,club de kayak, maisons éclusières, seront démolies. La traversée sera encore longue avant que les Agenais ne puissent, à nouveau, traverser la gare par les hauteurs.
Le RN dénonce un abandon du quartier //
Dans un communiqué diffusé à la suite de l’annonce du retrait de la passerelle provisoire, Sébastien Delbosq, président du RN47, n’a pas mâché ses mots. Il y voit le symptôme « d’un abandon pur et simple du quartier de l’Ermitage » et fustige « 23 années d’atermoiements entre la Ville et la SNCF ». Pour lui, la passerelle Gauja « n’est pas un simple ouvrage d’art, c’est un lien vital entre les habitants et le centre-ville, un vecteur de mobilité douce et un symbole du patrimoine agenais ». Il appelle à « une politique volontariste » avec le lancement immédiat des travaux, la mobilisation de tous les financements possibles (État, Région, Europe), et la fixation d’un calendrier « contraignant et transparent ». Delbosq pointe aussi le retard pris sur d’autres points névralgiques pour les cyclistes et piétons, notamment le pont Piketty, théâtre d’une récente chute grave, ou encore le pont de la Libération, « inadapté aux mobilités d’aujourd’hui ».
« Il est temps de passer aux actes concrets, d’adopter un vrai plan d’aménagement global. Les Agenais méritent mieux que des promesses sans lendemain », conclut-il. Pas de quoi inquiéter Jean Dionis qui balaie ces reproches d’un revers de main : « Quand j’entends dire que cette passerelle est un lien vital… Non. Important, oui. Vital, non. Ce discours relève de l’opportunisme », assène-t-il.
Les habitants réclament des garanties claires
Face à l’abandon du projet de passerelle provisoire, les habitants de l’Ermitage, réunis au sein du collectif Passerelle Gauja, expriment une défiance grandissante et exigent des assurances fermes sur la livraison de la passerelle rénovée d’ici fin 2027. « Comment croire à un chantier qui commence avec du retard et se terminerait plus tôt que prévu ? », questionnent-ils, pointant un calendrier qu’ils jugent irréaliste. Certains rappellent que « si la Ville avait écouté dès 2023 les propositions faites pendant l’interruption ferroviaire, une passerelle temporaire aurait pu voir le jour ». Le sentiment d’abandon est fort dans ce quartier coupé du centre, où la passerelle n’est pas perçue comme un simple équipement mais comme « un lien vital pour les mobilités douces et le quotidien des lycéens ». Tandis que la mairie avance des alternatives comme la voie verte ou la mise à sens unique du pont Piketty, les riverains estiment qu’« on s’attaque aux détails pendant que l’essentiel reste en suspens ». La promesse d’une rénovation en deux ans ne suffit plus, et le collectif réclame « un engagement solennel, daté et contraignant », faute de quoi, préviennent-ils, « la mobilisation pourrait s’accélérer dès les prochaines semaines. Et le collectif compte bien faire savoir cela lors d’une réunion publique au sujet de la passerelle, organisée par la Ville ce 30 septembre en soirée.
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