Hubert Cazalis, directeur d’Agrinove : « La création de la pépinière d’entreprises et l’accueil des premières startups ont constitué une aventure incroyable »

Hubert Cazalis, directeur d'Agrinove, nous éclaire sur l'innovation agricole. Il partage les succès des startups incubées, les projets d'expansion de la technopole et sa vision audacieuse pour l'avenir de l'agriculture en France.

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Quidam Hebdo : Pouvez-vous nous présenter Agrinove et sa mission principale ?

Hubert Cazalis : Le point principal sur lequel nous intervenons est vraiment lié à l’innovation. Pour cela, nous avons deux outils principaux : le Concours Innovation pour l’Agriculture, qui nous permet chaque année de primer trois lauréats apportant une contribution significative en termes d’innovation pour l’agriculture, et le Cluster Machiniste, créé il y a une dizaine d’années, qui regroupe des agroéquipementiers et des constructeurs de matériel agricole. En se mettant ensemble, ils gagnent en visibilité et sont mieux à même de développer des innovations pour résoudre des problèmes.

Q.H : Pouvez-vous nous donner des exemples de succès récents parmi les startups incubées ?

H.C : Parmi les startups que nous incubons ou accompagnons au sein du BDM Cluster, nous pouvons citer Comin Industries, une entreprise reprise il y a dix ans par Denis Vicentini, aujourd’hui président du Cluster, qui a développé la gamme Roll & Sem, favorisant de nouveaux utilisateurs en agriculture. Nous avons également accueilli et primé Hopen Terre de Houblon, qui a contribué à établir la filière houblonnière en Nouvelle-Aquitaine, une filière qui n’existait quasiment pas auparavant et qui est maintenant en plein développement grâce à cette entreprise. Hopen a remporté le premier prix du concours et s’est installée dans le Lot-et-Garonne, menant une première expérimentation avec une parcelle test en collaboration avec un commissaire d’école, ce qui a permis de créer un écosystème autour de l’entreprise. Plus récemment, nous accueillons des entreprises Api & Bee, qui apporte beaucoup à la filière agricole, et Mécaconcept, un bureau d’études en mécanique agricole. D’autres entreprises plus récentes, comme Gascogne Formation et la Distillerie du Grand Nez, qui s’est implantée dans la filière, ont également connu un beau succès.

Q.H : Combien de startups sont actuellement incubées à Agrinove ?

H.C : Aujourd’hui, quatre entreprises sont implantées. Certaines n’ont besoin que d’un bureau, comme Mécaconcept, tandis que d’autres nécessitent un atelier pour développer des projets, par exemple un Fab Lab ou du prototypage. Ces deux outils principaux peuvent être développés au sein de la pépinière. Nous attendons également avec impatience le premier terrain de la technopole.

Q.H : Aujourd’hui, la technopole Agrinove accueille l’entreprise Babcock Wanson, qui peut sembler éloignée des préoccupations agricoles de la technopole. Y a-t-il une volonté de créer une « petite sœur » de la TAG agenaise ?

H.C : Ce qui nous a séduits dans le projet de Babcock, c’était d’abord la possibilité de rester à Nérac, ce qui est très important pour l’Albret, car cela représente aujourd’hui 150 emplois, un chiffre qui pourrait encore augmenter avec l’extension de Babcock sur Agrinove. L’entreprise va s’étendre sur 8 hectares d’ici début 2026, ce qui est très significatif. De plus, l’innovation est au cœur de ce projet. L’innovation est un domaine vaste, et nous avons constaté un véritable intérêt de l’entreprise pour les aspects innovants, notamment en matière technologique. Bien que cela ne soit pas directement lié à l’agriculture, il existe des synergies possibles avec le machinisme agricole, l’industrie et l’énergie, offrant ainsi des thèmes intéressants à explorer.

Q.H : Et qu’en est-il de la pépinière ? Certaines entreprises y ont bien fleuri, comme la distillerie du Grand Nez.

H.C : Le bilan est très positif, car la technopole est maintenant bien établie. La pépinière d’entreprises fonctionne depuis 5 ans, et le Cluster Machiniste ainsi que le concours ont célébré leurs 10 ans. Il est maintenant temps de libérer des terrains pour des entreprises plus matures qui ont besoin de plus d’espace. Les travaux vont débuter dans quelques semaines, ce qui signifie qu’à l’horizon 2026, nous aurons les premières installations de l’autre côté du lycée agricole. Cela nous permet d’anticiper de beaux succès pour de nouvelles entreprises à proximité immédiate de la route d’Agen. La pépinière a pour objectif d’accueillir les entreprises durant leurs premières années, cruciales pour leur développement, avant qu’elles ne passent à une phase de croissance. Par exemple, la distillerie a besoin de plus d’espace et a trouvé une opportunité à 500 mètres de la pépinière (au château du Frandat, route d’Agen, NDLR). Cela préfigure déjà un peu la pépinière de demain, ce que nous souhaitons maximiser : offrir à ces entreprises la possibilité de se développer tout en restant dans la région. C’est également le cas de Gascogne Formation, qui commence avec la pépinière d’entreprise mais espère implanter son centre de formation au sein de la technopole à l’avenir.

Q.H : La volonté de la ville dAlbret Communauté est de permettre à Agrinove de fleurir davantage. Où en est-on de la mise en œuvre de la zone de la pépinière ?

H.C : La pépinière d’entreprises n’a pas vocation à s’agrandir au-delà de ses 7 bureaux et 4 ateliers. Cependant, nous prévoyons de créer un hôtel d’entreprise pour permettre aux sociétés de louer des espaces sur le long terme. Concernant la technopole, comme nous l’avons déjà évoqué, elle a pour but de permettre aux entrepreneurs d’acquérir des terrains pour développer leur entreprise et leur activité de production sur un foncier qui leur appartient. Cela représente une assurance de plus en plus forte pour leur développement.

Q.H : Comment voyez-vous l’évolution de l’agriculture en France dans les dix prochaines années et quelle sera la place d’Agrinove dans cette transformation ?

H.C : Il est difficile d’être visionnaire, car l’agriculture française, européenne et mondiale fait face à de nombreux défis. Nous souhaitons vraiment être des promoteurs de l’innovation, car il est essentiel de trouver de nouveaux matériaux et de nouvelles façons de cultiver, récolter, etc. Nous croyons fermement à l’innovation et au machinisme agricole, et nous essayons de promouvoir de nouvelles idées. C’est pourquoi chaque année, nous organisons un forum à Nérac, Agrinovembre (la prochaine édition aura lieu le 12 novembre prochain, NDLR), pour mettre en avant les innovations agricoles. L’après-midi, à l’Espace d’Albret de Nérac, nous aurons Philippe Dessertine, un économiste de renom, en vedette, ainsi que deux tables rondes consacrées aux innovations dans les domaines de l’énergie et de l’accès aux ressources. L’objectif est de stimuler les réflexions, d’échanger des idées et d’encourager l’innovation en faisant fonctionner l’intelligence collective.

Q.H : Qu’est-ce qui vous passionne le plus dans le secteur agricole et dans votre travail chez Agrinove ?

H.C : Je suis quelqu’un qui a toujours travaillé dans le milieu rural. J’ai obtenu un master 2 en aménagement rural et développement local il y a quelques années, suivi d’un concours de la construction territoriale. En tant qu’ingénieur territorial, j’ai trouvé un poste à Nérac au service de la Communauté de Communes, où j’ai beaucoup travaillé sur l’emploi, la formation et le développement économique. J’ai eu la chance d’être sélectionné pour être le premier directeur d’Agrinove, ce qui a été une expérience très stimulante. Participer à la création d’Agrinove dès ses débuts a été passionnant, car j’ai pu imaginer le projet avant même d’avoir un lieu, en réfléchissant à tout ce qui pouvait nous donner de la visibilité. La création de la pépinière d’entreprises et l’accueil des premières startups ont constitué une aventure incroyable, bâtie à partir de presque rien.

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