De l’horticulture aux Baladins //

Originaire de la région bordelaise, Marc Mondon a atterri au lycée Fazanis, à Tonneins, pour y passer un brevet de technicien agricole en horticulture. Il partage les bancs de l’école avec le comédien Philippe Candelon. « Il m’a ouvert les portes des Baladins en Agenais, à qui je suis venu donner un coup de main lors de la première Nuit du Théâtre », raconte Marc. À l’époque, dans les années 80, la troupe du grand Roger Louret se contente d’un rayonnement départemental. « J’ai proposé à Roger de m’occuper de la partie administrative. Il m’a répondu : «Enfin quelqu’un qui ne veut pas monter sur scène !» Roger Louret avait cette faculté de déceler un potentiel chez les gens qu’eux-mêmes ne soupçonnaient pas et de le transcender. Il m’a fait confiance et ça a été le début de l’aventure. » À 22 balais, sans aucune expérience ni contact dans le milieu, il s’arme de son envie et de son culot pour monter la première tournée nationale des Baladins. « J’avais un téléphone et un minitel, ce qui était très pratique à l’époque pour trouver les adresses. J’ai appelé les directeurs de salles pour les convaincre. Ça n’a pas trop mal marché. » Du coup, point d’horticulture au programme mais le lancement d’une carrière dans le monde du spectacle.
Le théâtre, une rampe de lancement peu rentable //
« Avec Roger Louret, c’était un peu «je t’aime, moi non plus». L’expérience à ses côtés m’a permis de prendre confiance en moi, de voir que j’étais capable. A l’issue de cette période chez les Baladins, j’ai créé ma structure de diffusion. J’ai contacté les compagnies de théâtre de la région pour les aider à programmer leurs spectacles. Il y a eu des histoires incroyables comme une tournée à Singapour avec une compagnie périgourdine de théâtre masqué sans parole. » Malheureusement pour Marc, la diffusion du théâtre n’était pas vraiment rentable. Pour faire bouillir la marmite, il bossait comme pion la nuit dans un internat à Bergerac et faisait vivre son association le jour. « C’était une période pas simple mais ça m’allait, parce que c’était un choix. »
La route vers les sommets, Johnny à Villeneuve-sur-Lot //

Dans les années 90, Marc Mondon commence à se frotter au « showbiz ». Il organise la venue de Michel Boujenah à Marmande et fait défi ler les vedettes au Comedia. Les gros concerts marchent également très bien. Incontestablement, le moment le plus marquant de cette période est la venue de Johnny Hallyday à Villeneuve-surLot, sur la pelouse de la Myre-Mory en 1993. L’idole des jeunes faisait sa première vraie tournée des stades après le Parc des Princes et Marc a tout fait pour que sa ville d’adoption ne rate pas l’occasion. « J’ai pris tous les risques dans cette histoire. J’ai payé l’artiste et son équipe, le son, les lumières, la sécu… tout ! Derrière, il fallait qu’il y ait du monde. Et hormis la mise à disposition du stade, ça n’a pas coûté un centime à la mairie à l’époque, contrairement à ce que l’on pouvait entendre. Comme disait Oscar Wilde, les folies sont les seules choses qu’on ne regrette jamais ! »
2001 : Sir Elton John débarque à Bergerac //
De coup d’éclat en coup d’éclat, Marc Mondon s’est bâti une solide réputation dans le milieu. Il a commencé à travailler avec la plupart des grands noms de la variété française : Claude Nougaro, Eddy Mitchell, Julien Clerc, Francis Cabrel et bien d’autres… « De fil en aiguille, on s’est mis à faire 100 à 120 dates par an. C’était un rythme infernal ! » Pour ne rien arranger, le producteur villeneuvois s’est rajouté quelques petites difficultés en s’attaquant à une rockstar mondiale : Elton John pour sa seule représentation en France. On est en 2001 et ça se passe au stade de… Bergerac. Et le Britannique n’a pas fait les choses à moitié avec quelques excentricités dont il a le secret. « Entre sa loge et la scène, il y avait un trajet de 20 mètres. Il les a parcourus en limousine. Ça entretient la légende. Pour ce concert, j’avais embauché une centaine de personnes au total. Mais tout ça aurait bien pu ne jamais arriver. On était en pleine épidémie de vache folle. Lors d’une réunion avec le préfet, celui-ci m’a dit qu’à l’atterrissage de son avion, il devrait passer par un pédiluve. J’ai essayé de lui faire comprendre que ce n’était pas le genre de personne à qui on peut demander ça… »
L’évolution du métier //
En bientôt quarante ans d’activité, Marc Mondon a connu des époques très différentes. « Au fi l du temps, le métier s’est vraiment professionnalisé et c’est une bonne chose. En revanche, les possibilités d’hier ne sont plus celles d’aujourd’hui. L’équivalent d’un Johnny à Villeneuve ou d’un Elton John à Bergerac, ce n’est plus envisageable. » La période Covid a aussi eu son effet sur le monde du spectacle dans son ensemble. « La fréquentation des salles a grandement diminué alors que les coûts de production, eux, augmentent. Les petites et moyennes jauges sont très difficiles à rentabiliser. C’est pour cela qu’on voit ici et là des reports à répétition ou des annulations. Dans la majorité des cas, c’est à cause d’un remplissage insuffisant. Ce qui marche le mieux, ce sont les gros festivals et les spectacles de grande envergure. »
Le métier de producteur //
Marc Mondon est à la tête de sa propre société de production, qui porte d’ailleurs son nom. S’il n’intervient pas dans le processus créatif des artistes, il est en revanche un maillon essentiel de leurs représentations sur scène avec plusieurs degrés d’intervention. Dans certains cas, Marc produit l’ensemble d’un spectacle, comme pour la tournée du disque de diamant de David Hallyday en 2019. « Je finance tout et à moi de trouver des lieux et des dates. Soit je fais tout en direct, c’est-à-dire que je loue une salle, j’assure la promo et j’encaisse les recettes. Soit je vends le spectacle, à une collectivité ou des festivals par exemple, par un contrat de cession. » Le Villeneuvois peut aussi être un intermédiaire pour diff user une partie seulement de la tournée. « Dans ce genre de situation, je peux devenir un promoteur local pour de grosses boîtes de production à l’instar de Live Nation, Gérard Drouot Productions et d’autres. » Le fait d’avoir plusieurs casquettes a ses avantages. « C’est un moyen de répartir les risques. Et puis quand on est vraiment très près des artistes, on devient le papa, le confident, l’employeur… C’est génial mais aussi un peu éprouvant. » Depuis la création de la société en 1996, après la phase associative, Marc Mondon n’a jamais déposé le bilan. Ce qui est un petit exploit dans ce milieu. Plus de 300 célébrités ont travaillé avec lui. Toujours à la page, il collabore avec des artistes très actuels, dans l’humour comme la musique où il couvre un large panel de styles.
Toujours attaché à son territoire //
Marc Mondon produit des spectacles partout en France, en Suisse, au Bénélux, dans l’Océan indien, en Asie. Mais l’un de ses terrains de jeu préférés reste son territoire : le Villeneuvois. On lui doit d’innombrables têtes d’affi che au parc des expositions. Plus récemment, c’est aussi lui qui est à la manœuvre pour les grands concerts estivaux comme Black M, Gilbert Montagné, Sheila ou Magic System. « C’est toujours un bonheur de bosser chez soi. On mesure encore mieux à quel point ça touche les gens. »
La relation avec les stars //
« Dans le showbiz, on retrouve les mêmes couillons et les mêmes gentils que dans la vraie vie. Sauf que tout est démultiplié. Avec parfois des excès. Ça peut être accentué par l’entourage des artistes qui est de plus en plus nombreux. Par contre, ceux qui ont réussi à rester humbles et simples malgré le succès et l’argent sont de vraies belles personnes. Ce métier m’a amené à de magnifiques rencontres, parfois là où je ne m’y attendais pas. Il y a aussi des déceptions. Mais au bout du compte, la seule chose importante, c’est que tout le monde soit pro vis-à-vis du public pour lui faire vivre la plus belle expérience possible. »
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