
L’entrepreneuriat féminin, sujet au cœur des débats économiques actuels, continue de révéler des défis persistants malgré des avancées tangibles. L’initiative se voulait sobre, informative et structurée. L’événement « Femmes et succès entrepreneurial », tenu 20 mai au Campus Numérique 47 d’Agen, n’a pas dérogé à cette ligne. À l’invitation de la French Tech Lot-et-Garonne, six femmes, figures du tissu économique local, ont partagé leur parcours professionnel devant un auditoire d’acteurs économiques du département. Objectif affiché : documenter les réalités du développement entrepreneurial féminin dans un contexte encore marqué par des déséquilibres.
Un panorama local de l’entrepreneuriat féminin
En introduction, les organisateurs ont esquissé un état des lieux chiffré. En 2025, selon les données régionales évoquées, les femmes représentent 34 % des créateurs d’entreprises en Nouvelle-Aquitaine. Une progression lente, stable, mais encore éloignée de la parité. Dans le Lot-et-Garonne, la répartition demeure plus marquée : une entreprise sur quatre y est dirigée par une femme. Ces disparités ne relèvent pas uniquement des secteurs d’activité ou de l’accès au capital. Elles s’inscrivent aussi dans des logiques de représentation, de réseau, d’accompagnement.

L’intervention de Sabine Lacroix, déléguée régionale de Orange en Nouvelle-Aquitaine, et d’Alicia Ho, directrice adjointe du développement économique et touristique du Grand Villeneuvois, a posé les contours d’une table ronde centrée sur l’accès aux dispositifs d’aide, la structuration des parcours, et la visibilité des entrepreneurs. Les participantes, issues d’univers professionnels hétérogènes, ont ensuite illustré par leurs récits les multiples visages de cette dynamique entrepreneuriale féminine.
L’état des lieux
La représentation des femmes dans le monde entrepreneurial reste encore loin de la parité. En 2025, les femmes ne dirigent qu’environ 30 % des entreprises en France, un chiffre qui varie selon les secteurs et les territoires. Ce déséquilibre s’explique par plusieurs facteurs, « notamment les stéréotypes de genre, les difficultés d’accès aux réseaux professionnels et aux financements. » Les freins structurels à l’entrepreneuriat féminin sont multiples : charge mentale, conciliation vie privée/vie professionnelle, accès limité aux financements et aux réseaux d’influence. Pourtant, des initiatives comme celle portée par la French Tech Lot-et-Garonne tendent à favoriser une meilleure visibilité et un soutien accru aux femmes entrepreneures, condition indispensable pour réduire ces écarts.
Formaliser un besoin d’accompagnement
La table ronde qui a suivi ces témoignages a élargi le propos. Sabine Lacroix rappelle que « 80 % des appels à projets publics en région restent attribués à des structures dirigées par des hommes, et qu’un déséquilibre similaire existe dans l’accès aux incubateurs privés. » Alicia Ho pour sa part pointe du doigt « la faible visibilité des dirigeantes dans les réseaux d’affaires traditionnels et les chambres consulaires » en soulignant « l’enjeu de représentativité dans les instances locales de décision économique.«
Les échanges ont insisté sur l’importance d’un accompagnement sur mesure, notamment pour les phases de transition : création, croissance, reprise, reconversion. Plusieurs intervenantes ont évoqué l’absence d’ingénierie adaptée aux structures de petite taille, la complexité d’accès aux formations continues, et l’insuffisance des solutions de financement alternatives.
La parole aux entrepreneures
Alexandra Fregonese, présidente des Laboratoires Innovi. L’évolution de son entreprise de biotechnologies cosmétiques depuis ses débuts a suivi une logique d’auto-financement et d’intégration verticale, dans un secteur à forte barrière réglementaire. « J’avais 23 ans et donc vendre mon premier brevet ne m’aurait pas aidé à me lever le matin. »
Nathalie Sablier dirige O’Leaks, une structure spécialisée dans la détection de fuites d’eau. Elle a évoqué les freins culturels rencontrés au démarrage, notamment dans la relation client, souvent biaisée par des stéréotypes de genre encore très présents dans les métiers du bâtiment et les métiers manuels.« Mon entreprise compte aujourd’hui deux salariés et on est en passe d’en embaucher un troisième. »
Marion Zuccolotto, fondatrice de Protect Sécurité à Marmande dont l’intervention a mit en lumière les tensions physiques et morales rencontrées à l’époque de la crise sanitaire. Aujourd’hui, elle pilote une société de sécurité dans un secteur en mutation, marqué par la numérisation des outils de surveillance. « Je remercie toujours mes employés pour ce qu’ils font. »
Samia El Kadi, fondatrice de Cocon Cosmétiques, a témoigné de son parcours, où elle a développé une gamme de soins cosmétiques biologiques. Loin d’un récit lissé, elle a évoqué les difficultés économiques des premières années, les tensions liées à la charge mentale, ainsi que les arbitrages familiaux. « C’est grâce à l’une de mes filles que l’idée de Cocon Cosmétiques a vu le jour. »
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