
Agen s’apprête à vivre un hiver éclairé d’un prestige rare. À partir de ce vendredi 5 décembre, l’église des Jacobins ouvre ses portes à une exposition d’envergure nationale : « Lumières françaises, de la cour de Versailles à Agen », un parcours immersif qui relie le destin du Lot-et-Garonne au foisonnement intellectuel du XVIIIᵉ siècle. Pendant trois mois, plus de 270 œuvres, peintures, sculptures, porcelaines, archives , composeront un dialogue inédit entre Versailles et l’Agenais.
Versailles envoie ses trésors

Il suffit d’un pas dans la nef pour comprendre que l’événement dépasse largement le cadre d’une simple exposition locale. Dix pièces majeures, tout droit venues du château de Versailles, ornent les cimaises. Un prêt exceptionnel : « Nous partageons régulièrement nos collections en France, mais jamais dans de telles proportions pour une seule exposition », glisse Lionel Arsac, l’un des conservateurs versaillais associés au projet. Trois années de travail ont été nécessaires pour rassembler ces œuvres, enrichies par des prêts du musée du Louvre, de la Bibliothèque nationale de France et du fonds du musée des Beaux-Arts d’Agen.
Un voyage du roi à la Garonne

La scénographie, élaborée notamment par Adrien Enfedaque, reconstitue d’abord une véritable bibliothèque des Lumières, inspirée de celle du duc d’Aiguillon, figure centrale du parcours. Ouvrages philosophiques, bustes, médaillons et une frise numérique déroulant les grandes dates du siècle accueillent le visiteur dans une atmosphère studieuse. « L’idée était de montrer que les Lumières ne se limitaient pas aux salons parisiens : elles irriguaient déjà les provinces, et l’Agenais en est une preuve éclatante », résume le commissaire général. Un ensemble restauré de la collection d’Aiguillon permet de redécouvrir le goût raffiné de ce mécène qui fit dialoguer, en son temps déjà, créations locales et chefs-d’œuvre nationaux. Le célèbre portrait de Madame du Barry du musée d’Agen fait face à son équivalent versaillais, comme pour marquer le pont symbolique entre capitale et province.
Femmes de pouvoir et intrigues de cour
Une salle poudrée de rose plonge ensuite dans les coulisses du pouvoir au féminin. Pompadour, Châteauroux, Dubarry : les favorites qui influencèrent l’Europe des arts s’y dévoilent à travers des bustes et toiles rarement montrés hors de Versailles. Le parcours revient aussi sur l’itinéraire mouvementé du duc d’Aiguillon : ses réformes urbaines à Rennes et Nantes, la bataille de Saint-Cast ou encore sa rivalité politique avec Choiseul, un duel d’ambition qui conduira les deux hommes à l’exil.
Le visiteur plonge ensuite dans la « boîte violette », installation immersive évoquant le retrait du duc dans son château d’Aiguillon en 1775. Vues numériques, mobilier reconstitué, musique d’époque : tout y est conçu pour redonner vie à un patrimoine aujourd’hui disparu. La seconde partie de l’exposition explore la vie en Agenais avant même l’arrivée du duc : le commerce fluvial sur la Garonne, les ateliers d’orfèvrerie, les réseaux protestants, les pouvoirs locaux. Parmi les pièces les plus surprenantes figure la redécouverte d’un plan ancien de la cathédrale Saint-Étienne, longtemps considéré perdu.
L’exposition se conclut sur l’effervescence savante qui animait Agen en 1776, des sociétés érudites aux premières recherches archéologiques. « C’est presque deux expositions en une : Versailles éclaire Agen, et Agen redonne chair à Versailles », résume Adrien Enfedaque. Une partie de la collection rejoindra d’ailleurs le château d’Aiguillon en 2026 pour prolonger ce dialogue rare entre grande et petite histoire.
Renseignements //
Lieu : Église des Jacobins, Agen
Dates : du 5 décembre au 8 mars
Horaires : 11h–19h tous les jours (fermée les 25 décembre et 1er janvier). Nocturnes jusqu’à 21h chaque jeudi.
Tarifs : 6 à 12 €.
Renseignements : Office de tourisme Destination Agen – 05 53 87 88 40. Programme complet à retrouver sur le site web du musée





Laisser un commentaire