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L’ouverture a avait été célébrée, la fermeture sera amère. Le besoin d’une nouvelle offre de soin sur le territoire est si grand que toute aide est systématiquement la bienvenue. Celle de Sagéo n’aura malheureusement pas duré très longtemps. Ouvert en juin 2022, ce centre de santé privé n’aura jamais réussi à atteindre le rythme de croisière suffisant pour trouver l’équilibre économique. « Tout ça pour ça », se lamentent plusieurs protagonistes de cette aventure que tout le monde espérait belle.
Défaut de paiement
Au cours des derniers mois, deux médecins généralistes ont quitté le navire. Le dernier praticien encore en poste n’exerçant quant à lui que deux jours par semaine. La principale raison de ces départs réside dans un défaut de paiement. À court de trésorerie, Sagéo ne pouvait plus payer ses fournisseurs… ni ses salariés, du moins en totalité. Ceux qui ont pu trouver un emploi ou un remplacement ailleurs n’ont fort logiquement pas attendu pour partir. D’autres collaborateurs n’ont pas eu cette opportunité et répondent donc toujours présent à l’appel jusqu’à la fermeture définitive malgré des traitements partiels depuis un certain temps maintenant. Des procédures aux Prud’hommes ont été engagées par certains. De l’autre côté de la carte vitale, ce sont de nombreux patients qui se retrouvent aujourd’hui orphelins de leur médecin traitant. Ils étaient entre 2500 et 3000 à fréquenter le centre de la place du Maréchal Foch, et ils auront fort à faire pour retrouver des places en consultation ailleurs.
Les limites du modèles
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Le site d’Agen n’est pas le seul concerné car c’est l’ensemble du groupe Sagéo (cinq centres en France) qui a été placé en liquidation judiciaire jeudi 13 février. Déplorer cette situation ne sert pas à grand- chose si l’on n’en comprend pas les causes. Il est important de noter qu’il s’agit ici d’un centre de santé 100% privé, sans aucune subvention de la collectivité, si ce n’est un peu de communication au moment du lancement. « La plupart des établissements de santé aujourd’hui, à l’exception des libéraux, rencontrent d’importantes difficultés : les hôpitaux, les MSP, les centres… Sauf qu’avec notre statut privé, nous ne pouvons pas survivre en étant déficitaires », explique Syl- vain Falinower, directeur santé chez Sagéo. Dans cette structure les médecins sont salariés et sont épaulés dans les tâches administratives par une équipe dédiée. Ces tâches sont d’autant plus lourdes que Sagéo applique le tiers payant intégral. Le bâtiment de 300 m2 représente aussi un poste de dépenses très important. « Notre modèle peut fonctionner si nous avons un nombre de médecins suffisant. À Agen, il aurait fallu environ 5 praticiens. C’était cohérent par rapport aux besoins du territoire. Mais nous n’avons jamais réussi à en recruter plus de la moitié », concède Sylvain Falinower. Notre département confirme une fois de plus son statut de désert médical. L’initiative de Sa- géo était belle, mais se termine mal à tout point de vue, notamment pour les employés et les patients… Cette fermeture pose plus largement la question de la pérennité des centres de santé pluriprofessionnels. Selon un récent rapport de l’Igas (Inspection générale des affaires sociales), seul un tiers de ces structures par- viennent à dégager un résultat excédentaire, la faute à une explosion des charges, à une productivité médicale insuffisante et à un modèle de financement imparfait.
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