
Mardi 20 mai, les gendarmes de la Section de recherche de Bordeaux ont procédé à l’audition, sous le régime de la garde à vue, de Patrick Franken et Serge Bousquet-Cassagne, respectivement président actuel et ancien président de la Chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne. Deux autres figures de la Coordination rurale 47 (CR 47), Pascal Béteille et Pierre Grosz, ont pour leur part été entendues librement. L’ensemble de ces auditions s’inscrit dans le prolongement du contentieux bien connu du lac de Caussade, une retenue d’eau construite sans autorisation entre 2018 et 2020 à Pinel-Hauterive.
Sur fond de condamnation ancienne
Déjà condamnés en 2022 à dix mois de prison avec sursis et à des amendes pour cette infraction, les deux responsables agricoles font désormais face à de nouvelles accusations : ils sont soupçonnés d’avoir utilisé des fonds publics : ceux de la Chambre d’agriculture et du syndicat CR 47, pour s’acquitter de leurs amendes personnelles. Ces paiements, réalisés selon des délibérations internes que les enquêteurs estiment potentiellement irrégulières, soulèvent des soupçons de « prise illégale d’intérêts » et de « détournement de biens d’un dépôt public ». Les auditions ont duré l’ensemble d’une matinée. Tandis que les deux membres entendus librement ont rapidement exercé leur droit au silence, les gardes à vue de Franken et Bousquet-Cassagne se sont achevées aux alentours de midi. À leur sortie, tous deux ont affiché une forme de sérénité, assurant que les échanges avaient été « respectueux » et qu’ils « assumaient pleinement leurs décisions ».
La crainte qui grimpe

Dès le matin, une trentaine de sympathisants de la Coordination rurale s’étaient massés devant les grilles de la gendarmerie d’Agen. L’ambiance était calme mais résolument solidaire. La coprésidente de la CR 47, Karine Duc, dénonçait un « acharnement ciblé » : « À chaque mobilisation agricole, c’est toujours notre syndicat qui se retrouve convoqué. Difficile de croire à une simple coïncidence. » De leur côté, les principaux concernés maintiennent leur ligne de défense. « Les décisions ont été prises en toute transparence et validées par les instances compétentes », insiste Patrick Franken. Pour Serge Bousquet-Cassagne, il s’agit d’une « différence d’interprétation juridique » plutôt que d’une véritable infraction : « On pensait agir dans l’intérêt collectif, pas enfreindre la loi. » Il ajoute que le projet du lac, bien qu’illégal sur la forme, avait été motivé par des enjeux d’irrigation jugés cruciaux pour l’agriculture locale.
Comme évoqué dans notre dernière édition, certains élus locaux s’inquiètent toutefois de la tournure que prend cette affaire, redoutant un climat de défiance croissant entre monde agricole et institutions. En coulisses, plusieurs responsables régionaux appellent à une sortie de crise par le dialogue, afin d’éviter une nouvelle fracture territoriale. Si les auditions se sont déroulées sans incident, l’ombre d’un futur procès correctionnel plane. Les quatre hommes sont ressortis libres, mais les prochaines semaines pourraient être décisives pour l’avenir judiciaire et politique de la Coordination rurale du Lot-et-Garonne.
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