Elections législatives : le triomphe de Guillaume Lepers

Le maire de Villeneuve-sur-Lot a été élu député dimanche soir, parvenant à devancer Annick Cousin, élue RN sortante. Une grande victoire alors qu’il partait outsider.

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Tout au long de la journée, l’engouement est monté jusqu’à atteindre son apothéose à l’hôtel de ville de Villeneuvesur-Lot sur les coups de 20h. Lorsque Guillaume Lepers est sorti du « bocal » (son bureau) peu après sa garde rapprochée, il a été accueilli en triomphe par un public venu nombreux avant même que les résultats ne soient officialisés. Avec 54,13% des suff rages et un peu plus de 4000 voix d’écart, il devance assez nettement Annick Cousin (RN). Une victoire collective pour le groupe qui s’est constitué autour du premier édile villeneuvois après une campagne de terrain rondement menée. Après avoir battu Jérôme Cahuzac et l’Insoumis Xavier Czapla, il fallait réussir à rassembler au second tour. Le pari de s’engager dans cette élection s’est finalement avéré gagnant malgré des sondages qui le donnaient vaincu dès le premier tour. Maintenant que le scrutin est terminé, Guillaume Lepers joue l’apaisement : « Comme je l’ai été en tant que maire, je suis pas le député d’un clan ou d’une ville, je suis le député de toute la circonscription, de chacun de ses territoires et de chaque électeur. »

Quidam.Hbedo : Quel est votre sentiment après cette victoire ?

Guillaume Lepers : Je suis heureux et malgré tout surpris par l’ampleur des résultats, même si on a observé toute la journée de dimanche une mobilisation croissante dans les bureaux de vote avec des familles qu’on n’avait plus vu depuis les municipales. Gagner à ce point-là, on ne l’aurait pas imaginé. Surtout le score sur Villeneuve qui me touche particulièrement avec 60% des voix.

Q.H. : Battre le Rassemblement national renforce-t-il ce sentiment ?

G. L. : C’est une vraie fierté dans un territoire où Annick Cousin avait gagné les dernières élections très largement. C’est une satisfaction aussi parce qu’on a fait une campagne de terrain, on a développé nos sujets. On a fait un vrai programme en y consacrant beaucoup de temps avec Emeline. On faisait face à des feuilles nationales préimprimées. On a fait des réunions publiques, parfois difficiles, on a discuté avec les gens, on a débattu contre un fantôme… C’est intéressant de voir que tout ça, c’est récompensé. Quand on a la proximité, quand on connaît les problèmes du territoire, ses atouts et ses faiblesses parce que l’on est des élus locaux, ça fait la différence. Ces dernières semaines, c’était plutôt l’étiquette. Ce dimanche soir, on a renversé la table de manière assez importante. Cela veut dire par ailleurs qu’il faut se poser la question très très vite sur la loi du non-cumul des mandats. Parvenir à rassembler, connaître ses sujets et agir sans sectarisme, ça paye.

Q.H. : Tout n’a pas été simple dans cette campagne, y compris avec votre propre parti historique…

G. L. : Dans cette campagne, j’en ai eu des embûches, officielles mais aussi officieuses. Mais ce n’est pas grave, on va passer à autre chose. L’important, c’est d’avoir réussi à sortir une député sortante en place depuis deux ans. On laisse d’abord la place au bonheur et à la joie de toutes ces équipes qui se sont battues et en particulier mon binôme Emeline Rey qui a amené beaucoup de fraîcheur et d’authenticité. Après, au vu de la situation très diffi cile au niveau national, j’ai envie de dire que le plus simple est fait. Le plus dur est clairement devant nous.

Q.H. : Savez-vous déjà au sein de quel groupe vous allez siéger et pour mener quelle politique ?

G. L. : J’ai des réunions en visio qui vont tomber dès la semaine prochaine avec des collègues républicains sortants comme Aurélien Pradié, Ian Boucard et quelques autres. On a un groupe assez solide, on devra discuter de la suite. En tout cas, il est hors de question que je siège à côté de personnes « ciottistes ». On trouvera les solutions adéquates. Ce sera soit dans un parti LR qui aura su se renouveler soit ailleurs. On verra. C’est encore un peu tôt. Il faut d’abord voir la recomposition nationale. Comment va se maintenir le Front populaire avec ses différentes variantes ? Idem pour nous les LR… Mais c’est peut-être l’opportunité pour nous tous d’apprendre une nouvelle façon de gouverner en France. Peut-être faire un peu moins de lois mais qui correspondent plus aux besoins actuels et aux priorités avec un peu plus de consensus que par le passé. Un modèle à l’Allemande en quelque sorte. On ne sait pas faire en France mais on va peut-être devoir apprendre. Ce qui m’importe, ce sont les priorités du territoire, surtout un territoire rural comme le nôtre où les difficultés sont plus importantes qu’ailleurs. S’il y a des propositions qui nous plaisent sur la santé, sur le pouvoir d’achat, sur la sécurité, sur l’agriculture, sur la culture, on saura prendre nos responsabilités. S’il y a des bonnes choses, je les voterai. Si elles ne sont pas en accord avec mes valeurs, je m’y opposerai.

Q.H. : Qu’avez vous à dire aux électeurs de gauche qui vous ont permis d’être élu ?

G. L. : Que je ne l’oublierai jamais. Comme je l’ai dit, je n’ai jamais fait de sectarisme depuis mon premier jour en tant que maire. Je suis le député de tout le territoire : les 4 Cantons, le Fumélois, le Pays de Serres, la Confluence… Il y a eu des moments déterminants comme cette réunion publique pour tenter de convaincre les électeurs de gauche et plus particulièrement du Nouveau Front Populaire. C’était la première « vraie » réunion publique dans ma vie politique parce que je n’étais pas devant un public de militants venus applaudir. J’ai eu besoin de clarifier ma ligne, expliquer certaines choses. Il y avait beaucoup de questions et d’échanges. Je pense que les gens en face de moi ont su écouter et comprendre. Ça a compté dans cette campagne.

Annick Cousin reconnaît avoir perdu une bataille mais pas la guerre

Malgré une perceptible et légitime déception à la préfecture pour la publication offi cielle des résultats, Annick Cousin a tout de même rejoint sa permanence parlementaire dans la soirée de dimanche pour retrouver ses soutiens. Arborant un grand sourire, la désormais ex-députée était plus dans le fair-play que l’amertume malgré un petit message de prévention pour son successeur. « Je félicite Monsieur Lepers d’avoir eu le courage de se présenter, ça valait le coup visiblement. Je lui souhaite aussi du courage pour assumer le bilan de Monsieur Macron et tout ce qui va venir pendant un an. Mais je doute fort que cela dure très longtemps. Compte-tenu du partage de l’Assemblée qui se dessine, cela risque d’être compliqué de tenir toutes les promesses faites aux électeurs. » Au-delà de la défaite, Annick Cousin retient d’avoir été la seule femme candidate sur la circonscription et d’avoir « balayé d’un revers de main » le très polémique Jérôme Cahuzac « courru par tous les médias notamment parisiens ». « C’est plutôt cocasse pour une petite standardiste dans un hôpital psychiatrique », ironise-t-elle.

« J’ai foi dans les idées que j’ai portées »

La représentante du Rassemblement national constate par ailleurs avoir gagné des voix par rapport aux précédentes législatives (18 747 il y a deux ans contre 23 464 ce dimanche). Ce qui lui permet de se projeter déjà dans l’avenir. « C’est de bon augure pour la suite, annonce-t-elle. On a perdu une bataille mais pas forcément la guerre. On verra ce que nous réserve l’avenir. Je reste confiante et j’ai foi dans les idées que j’ai portées pendant deux ans à la force de mon travail laborieux, j’ai foi en Jordan (Bardella) et en Marine (Le Pen) qui sauront très bien nous mener à une prochaine victoire. » Il n’est ainsi pas à exclure de revoir Annick Cousin revenir sur le devant de la scène prochainement. Il est peu probable que la mandature actuelle puisse tenir cinq ans sans une nouvelle dissolution. Sera-t-elle candidate aux prochaines municipales ? Là encore, rien d’impossible. « Je vais rester impliquée pour le territoire, j’y suis né, j’y vis, je l’aime et je le défends coûte que coûte. Je le faisais déjà avant d’être élue. »

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