Le vendredi 25 octobre, le Conseil départemental du Lot-et-Garonne a pris une décision inédite lors d’une séance toute aussi exceptionelle : réduire son budget annuel de 10M€ en cours d’exercice. Ce choix rare, qui concerne un budget total d’environ 500 millions d’euros, a été imposé par une baisse marquée des recettes, en particulier celle des droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Les recettes des DMTO, dépendant du marché immobilier, ont chuté de 34,5 % au premier trimestre 2024 et de 24,4 % au second par rapport à l’année précédente. « C’est assez inédit de baisser son budget en cours d’année. Généralement, ce sont plutôt des hausses de budget qui sont votées, note Sophie Borderie, présidente du Conseil départementale du Lot-et-Garonne. « Pour les seuls DMTO, ce sont 14 millions de moins entre 2022 et 2023 et encore 10 millions de moins attendus cette année par rapport au prévisionnel. C’est une chute vertigineuse, à des niveaux inédits depuis 2017. »
Une décision historique
Ces réductions risquent de s’amplifier en 2025, avec un contexte financier qui reste tendu. En effet, la suppression de l’autonomie fiscale du Département, avec notamment la perte de la part départementale de la taxe foncière sur les propriétés bâties, limite fortement les marges de manœuvre. « Nos principales ressources, comme les DMTO ou la fraction de TVA, sont extrêmement volatiles. Rien que pour les DMTO, nous avons déjà perdu 14M€ entre 2022 et 2023 », déplore Sophie Borderie. Pour elle, le constat est clair : l’État prive les départements d’outils de pilotage budgétaire, les plongeant dans une situation intenable.
La loi qui menace les investissements locaux
L’avenir semble encore plus sombre avec le projet de loi de finances 2025, qui pourrait imposer une réduction de 12 % du budget du Département. Si le texte est adopté en l’état, le Lot-et-Garonne devra trouver 60M€ d’économies, dont 16M€ immédiatement. « C’est du jamais vu », s’alarme Nicolas Lacombe, vice-président du conseil départemental, estimant que la charge demandée est insupportable. La situation devient critique pour les élus qui craignent que le budget ne puisse être équilibré, une obligation légale pour toutes les collectivités.
Le poids de ces économies pourrait notamment se faire sentir dans le secteur de l’investissement et de l’aide aux associations. Le BTP, qui dépend largement des projets publics, s’inquiète des impacts de cette réduction des dépenses. « Pour chaque million investi, ce sont une dizaine d’emplois directs et une vingtaine d’emplois indirects qui sont en jeu », souligne Sophie Borderie. D’autres secteurs risquent également d’en souffrir, notamment les EHPAD, les associations, les communes, mais aussi le monde de la culture, du sport et du médico-social.
Alors que le budget social, en grande partie incompressible, représente près de 280M€, la marge de manœuvre du Lot-et-Garonne semble étroite, voire inexistante. Sophie Borderie avertit qu’au-delà des efforts déjà réalisés pour réduire les dépenses, il est impossible de dégager 16M€ supplémentaires sans compromettre gravement les services rendus à la population. La présidente en appelle à la mobilisation citoyenne, en insistant : « Ce gouvernement devra rendre des comptes. »
Les 16M€ concernés dans le détail //
- 8,6M€ au titre du fonds de réserve
- 400 000€ de réduction du FCTVA (Fonds de compensation TVA)
- 2,9M€ au titre du plafonnement de la TVA
- 2,4M€ de baisse de la DGF(dotation globale de fonctionnement) et de baisse de la péréquation des DMTO
- 1,2M€ de revalorisation de la cotisation CNRACL (Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locale)
- 500 000€ au titre de la revalorisation du RSA de 1,9 %
Laisser un commentaire