Portrait. AS Nancy, Platini, équipe de France… La vie de « foot » de Bernard Caron

Il n’est pas le plus célèbre des footballeurs du 47, mais sans doute l’un des plus aguerris. Vainqueur de la Coupe de France avec Nancy en 1978, passé par Sedan et le PSG, Bernard Caron nous accueille à Monsempron-Libos pour raconter son parcours hors du commun.

0 Shares

Préambule :

« Bernard Caron, un grand timide qui change totalement dès lors qu’il est sur le terrain. Il devient intraitable et sûr de lui. Courageux dans l’effort, il est aujourd’hui l’une des pièces maîtresses de l’effectif nancéien. » Des articles et interviews à son égard rédigés par la presse sportive française des années 70, Bernard Caron en conserve par dizaines. À l’époque, cette éloge précédemment citée le place parmi les « tops joueurs » de l’AS Nancy Lorraine, juste à côté d’Olivier Rouyer et d’un certain Michel Platini… Près de 50 ans plus tard, le septuagénaire, toujours discret dans l’âme, se replonge de temps à autre dans les souvenirs de cette époque révolue. L’ancien footballeur conserve soigneusement des brochures de journaux qui constituent aujourd’hui une sorte d’archive personnelle, qu’il consulte parfois avec peut-être un peu de nostalgie dans son domicile de Monsempron-Libos. Un bon moyen de découvrir le récit méconnu de cet avant-gardiste du football en 47.

1952 : Les premières frappes

Bernard Caron est né en 1952 à Billy-Berclau, un petit village proche de Lille. Un endroit éloigné de la chaleur du Lot-et-Garonne, où il réside aujourd’hui, mais où il a grandi dans une atmosphère marquée par le sport. Son père, footballeur amateur, faisait partie de l’équipe de France amateur. Un homme de terrain qui, après avoir perdu son emploi dans le Nord, a vu une opportunité de rebondir en rejoignant l’usine de Fumel, dans le Lot-et-Garonne. « Je suis arrivé dans le coin vers 7 ou 8 ans, mais c’est vraiment ici que j’ai commencé à m’impliquer dans le football. Mon père, qui coachait Fumel à l’époque, m’a immergé dans ce milieu », raconte Bernard. Ses premières aventures footballistiques se déroulent dans le nord du département, avant de passer par Villeneuve, puis Agen, où il se distingue en étant sélectionné avec les Cadets du Sud-Ouest. Lui n’a qu’une chose en tête : devenir footballeur.

1969 : L’aventure professionnelle commence

Bernard Caron (en haut, au centre), avec le maillot frappé du coq.

Son histoire prend un tournant décisif à la fin des années 60. C’est grâce à l’intervention de son père, en contact avec Louis Dugauguez, entraîneur emblématique de Sedan, que Bernard a l’opportunité de s’y rendre en 1969 pour un essai. L’essai se transforme en une véritable aventure. À 17 ans, il fait ses premiers pas en Division 1. « C’était l’élite à l’époque, mais on n’était pas encore dans un monde totalement professionnel. On s’entraînait le matin de 6 h à 8 h, puis on partait travailler jusqu’à 16 h et on s’entraînait de nouveau dans la foulée. On avait des vies parallèles », se souvient-il. Très vite, Bernard grimpe les échelons et est sélectionné pour jouer avec les équipes de France junior, espoirs et B. En 1971, il aide Sedan à remporter la deuxième division, marquant ainsi le début d’une carrière prometteuse.

1975-1978 : Nancy et la consécration Coupe de France

En 1975, après avoir vécu une belle aventure à Sedan, Bernard rejoint le club de Nancy. « J’avais le choix entre Lille, Lens et Nancy. J’avais besoin d’un club à taille humaine, une atmosphère familiale comme à Sedan, c’est pour ça que je suis parti en Lorraine. » Il y trouve une équipe solidaire et un projet axé sur la jeunesse. Il devient rapidement titulaire au poste de libéro dans ce qui était alors « la meilleure défense du pays », rappelle-t-il. Nancy finit même en 1977 à la 4ᵉ position du championnat (meilleure performance du club encore aujourd’hui).

L’année suivante, Bernard Caron est au cœur de l’épopée qui voit Nancy décrocher la Coupe de France. « La victoire en 1978, c’était incroyable. Nous étions une équipe de copains, soudés. Battre Nice en finale (1-0, but de Platini), c’était un rêve devenu réalité. La veille encore, on faisait la bringue dans l’hôtel au point de se faire engueuler par tout le staff. Après le match, on avait été reçus comme des rois à Nancy », se remémore-t-il avec émotion. Je n’ai plus vraiment de contact avec les coéquipiers de cette époque, mais les souvenirs ne manquent pas, on est devenus des légendes du club. » Cette victoire restera le point d’orgue de son passage à Nancy, avant un départ inéluctable vers Paris.

1978-1980 : Un choix difficile mais logique

Le transfert de Bernard Caron au Paris FC en 1979 pour une coquette somme, marque la fin d’une époque à Nancy. « C’était difficile de partir, c’était une famille, mais le football fonctionne ainsi. Quand un club a besoin d’argent, on vend. J’étais le seul joueur transféré après la victoire en Coupe de France », confie-t-il. Mais la suite de sa carrière à Paris se révèle moins rose. Après une saison au Paris FC, où il évolue au Parc des Princes, il rejoint le Paris Saint-Germain, suite à la descente en deuxième division du Paris FC. Malheureusement, une série de blessures au début de la saison 1979 affecte son temps de jeu, avant qu’il n’ait l’occasion de rebondir à Rouen.

Après une saison en Normandie, Bernard Caron reçoit une proposition inattendue de Périgueux. Déjà installé dans le Lot-et-Garonne, il accepte et devient entraîneur-joueur, faisant monter le club en troisième division et atteignant les huitièmes de finale de la Coupe de France. Il poursuit ensuite sa carrière d’entraîneur au Stade Bordelais, à Bugue, puis revient dans la région pour diriger Penne-Saint-Sylvestre et Villeneuve-sur-Lot.

2025 : Tranquillité et réflexion dans son moulin

Aujourd’hui, après une carrière bien remplie et des années passées à entraîner dans divers clubs, Bernard Caron profite de sa retraite dans le calme de son moulin, à Monsempron-Libos. Il se souvient de sa carrière avec le sourire, en paix avec toute cette aventure. « Je suis bien ici, dans la nature, à pêcher, chasser, cueillir des champignons. Ça me permet de me ressourcer. Le football, c’est toujours présent, mais je n’ai plus cette pression. Maintenant, je me contente de regarder certains matchs à la télévision. » L’homme, désormais tranquille et épanoui, a vu le football évoluer au fil des décennies, tout en restant un témoin privilégié d’une époque passée, celle du football d’antan, où les joueurs étaient à la fois des professionnels et des hommes de travail. Une carrière riche, entre amitiés, titres et moments inoubliables, qui fait de lui un personnage à part dans l’histoire du football lot-et-garonnais.

Insolite : Quand Bernard Caron était sélectionné en Équipe de France sans le savoir

Avant de se faire une place parmi les meilleurs défenseurs du pays à Nancy, Bernard Caron avait déjà tapé dans l’œil des « Bleus » à Sedan. « L’entraîneur de l’époque, Stefan Kovacs, faisait parvenir au club ma sélection, mais étant donné que cela nécessitait que je quitte l’équipe pendant un temps, les dirigeants de Sedan avaient délibérément décidé de me cacher tout cela. Le staff de l’équipe de France, ne voyant pas de réponse de ma part, se disait que je n’étais probablement pas intéressé. Je l’ai appris bien plus tard et j’en ai longtemps voulu à Sedan. » À deux doigts de jouer, pourquoi pas, une compétition internationale avec les «Bleus »…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

+ 88 = 98