
Mercredi 29 octobre, au soir, la colère des agriculteurs du Lot-et-Garonne a grondé aux portes de l’usine d’équarrissage Atemax, au Passage-d’Agen. Une cinquantaine d’éleveurs de la Coordination rurale 47 (CR47) ont mené une nouvelle action symbolique, bloquant temporairement les camions qui transportaient des carcasses de bovins abattus dans des zones touchées par la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).
« On interdit aux éleveurs de déplacer leurs bêtes, mais on laisse circuler des camions remplis de carcasses venues de zones contaminées. C’est à n’y rien comprendre ! » dénonçait mercredi soir Karine Duc, coprésidente du syndicat, sur le bas-côté du site industriel. Pendant plus d’une heure, les militants ont contrôlé les documents de traçabilité des chauffeurs, estimant que ces convois pouvaient contribuer à la propagation du virus. « La DNC se transmet par une mouche, et cette mouche ne voyage pas seule. Si le virus se déplace d’un bout à l’autre du pays, c’est que les transports y participent », poursuivait-elle.
La polémique qui s’étend

Le calme retombé les jours suivants n’a pas suffi à calmer les inquiétudes. La FDSEA 47 et les Jeunes Agriculteurs ont pris à leur tour position, dénonçant une « prise de risque inacceptable ». Les deux syndicats pointent du doigt une « dissimulation d’actes » qui aurait, selon eux, « brisé la confiance entre les services vétérinaires et les organisations agricoles ». « Dans ces conditions, il devient difficile d’accorder foi aux protocoles officiels, notamment à celui de l’abattage total », poursuivent-ils, réclamant « une communication claire et transparente » ainsi qu’« une réévaluation des mesures d’abattage systématique ».
Pour Karine Duc, la colère reste intacte après-coup : « La maladie continue de se propager malgré les promesses de la ministre. On stigmatise les éleveurs au lieu de leur donner les moyens d’agir. » La CR47 demande la fin des abattages systématiques et la mise en place d’une vaccination massive et gratuite du cheptel. « Ciblons les bêtes malades, vaccinons, et préservons nos élevages », résume la syndicaliste. Pendant ce temps, le ministère de l’Agriculture affirme que « les mesures strictes mais nécessaires » ont permis de « stabiliser la situation sanitaire », annonçant la reprise des exportations de bovins depuis le 1er novembre Des déclarations qui peinent à convaincre sur le terrain, où beaucoup dénoncent un double discours. « On ne peut plus tuer une larve de mouche, mais on peut abattre des milliers de vaches. Cherchez l’erreur… », lâchait mercredi soir un éleveur désabusé.
Un risque de contagion bien réel ?
Vingt-quatre heures plus tard, la préfecture du Lot-et-Garonne a réagi dans un communiqué, rappelant que ces opérations d’équarrissage « sont strictement encadrées par la réglementation européenne et nationale » et qu’elles « constituent au contraire un levier essentiel pour prévenir toute contamination et maîtriser la circulation du virus ». Le préfet Daniel Barnier a précisé que les forces de sécurité avaient été mobilisées pour « garantir la sécurité du site et la poursuite d’activités indispensables à la sécurité sanitaire ». Des échanges ont eu lieu sur place entre les représentants de l’État, la direction d’Atemax et les agriculteurs. Selon la préfecture, le processus est « entièrement sécurisé ». Les animaux seraient euthanasiés sur place par des équipes mandatées, avant d’être « désinfectés et désinsectisés à plusieurs reprises ». À leur arrivée dans les usines, ils seraient ensuite incinérés immédiatement. « Les insectes transmettant la DNC se nourrissant uniquement sur des animaux vivants, ils ne peuvent pas propager le virus à partir de carcasses », précise encore le communiqué.
Chez Atemax, on insiste sur la rigueur du protocole : « Il n’y a aucune incinération ici », indique la direction. « Notre procédé repose sur le broyage, la cuisson et le pressage des matières afin d’en extraire les protéines et les graisses. » L’entreprise, qui opère dans quatorze départements du Sud, rappelle qu’elle agit « dans le cadre d’un service public de santé animale et environnementale ».





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